La Commission Certification de Walt a récemment adressé à France compétences (l’autorité nationale chargée d’enregistrer et de contrôler les certifications professionnelles — mission menée depuis 2019 via sa Commission de la certification professionnelle) une contribution appuyée. Elle s’inscrit dans le cadre de la réforme des niveaux de prise en charge (NPEC) et des « bouquets » de certification, prévue pour la rentrée 2026.
Depuis quelques années, les référentiels de compétences sont de plus en plus normés : verbes d’action, modalités précises, finalités claires… Pourtant, derrière ce cadre plus structuré, on constate une tension forte. Les compétences sont contextualisées au point de devenir illisibles hors du métier ciblé, empêchant leur reconnaissance dans des domaines voisins. Là où la certification aurait dû être un levier de mobilité, elle enferme.
À cela s’ajoute un glissement insidieux : la certification, censée reconnaître ce que l’on sait faire, se mue en exigence de parcours normés, confondant compétences acquises et formations suivies. En voulant contrer les dérives, on prend le risque de rigidifier le système et de freiner l’innovation pédagogique.
La réforme actuelle, qui vise à mieux structurer les bouquets de certification, est donc une opportunité : revenir à une certification plus lisible, équitable et ouverte aux trajectoires diversifiées.
Bouquets de certification : une méthode lisible, équitable et construite avec les acteurs
La Commission Certification de Walt, mobilisée dans le cadre de la réforme des niveaux de prise en charge (NPEC), propose un ensemble de mesures concrètes pour garantir que la future architecture des « bouquets de certification » soit au service de la lisibilité pour tous : branches, CFA, jeunes, financeurs, entreprises.
1. Une architecture des bouquets de certification fondée sur les codes NSF
Walt recommande de structurer les futurs bouquets de certification à partir des codes NSF (Nomenclature des Spécialités de Formation), car ils permettent :
- des regroupements pédagogiquement cohérents, selon les finalités professionnelles ;
- une articulation fluide avec les nomenclatures existantes (ROME, DARES, Onisep…) ;
- une meilleure prise en compte des formations transversales ou mixtes ;
- une simplification pour les CFA et les branches, sans perte de finesse.
Cette approche permettrait de créer 20 à 50 bouquets par niveau de formation, assurant ainsi stabilité, clarté et capacité d’adaptation.
2. Une modulation encadrée par les branches
Walt propose que les branches puissent moduler la valeur de référence d’un bouquet dans une limite de ±15 %, en cohérence avec leur enveloppe financière. Ce dispositif permet de :
- prendre en compte les spécificités locales ou sectorielles ;
- éviter les effets de rente ou de sous-financement durable ;
- responsabiliser les branches tout en préservant l’équité du système.
3. Un statut protecteur pour les formations transverses
Certaines formations stratégiques (RH, numérique, gestion, communication) risquent d’être sous-financées si l’on continue à raisonner uniquement par “cœur de métier”. Pour éviter cette invisibilisation, Walt propose :
- un statut spécifique pour ces certifications transversales ;
- un financement garanti dans tous les secteurs ;
- une reconnaissance de leur rôle clé dans l’employabilité et la transformation des entreprises.
4. Une anticipation claire des effets de la réforme
Walt identifie cinq grandes évolutions induites par le passage aux bouquets NSF :
Type de formation | Impact probable | Pourquoi ? |
Formations cœur de métier (industrie, BTP, soins) | ↔ ou hausse | Ces formations sont généralement bien identifiées dans les référentiels (codes NSF clairs), ont des taux d’insertion élevés et des coûts de formation cohérents avec leurs résultats. Elles bénéficieraient d’un bouquet bien calibré. |
Formations transverses (RH, com, digital) | Risque de baisse | Ces formations, utiles dans tous les secteurs, ne relèvent pas d’un métier unique. Elles risquent d’être mal intégrées dans une logique de regroupement par codes NSF métier-centrés, sauf si un statut spécifique est prévu. |
Formations sur-financées à faible coût réel | Baisse attendue | Certaines certifications bénéficient d’un financement supérieur à leur coût pédagogique réel. La réforme, en créant une valeur moyenne pour le bouquet, pourrait corriger ces écarts. |
Premiers niveaux de qualification (CAP, Bac Pro) | Risque de revalorisation | Ces formations sont souvent sous-évaluées alors qu’elles concernent des publics en insertion et des métiers en tension. La réforme pourrait (et devrait) corriger cette sous-valorisation. |
Formations peu représentées ou hybrides | Risque de dilution ou d’invisibilité | Ces formations ne rentrent pas facilement dans un bouquet standard. Elles risquent d’être mal classées ou mal financées sans un mécanisme d’ajustement qualitatif ou de recours. |
5. Une gouvernance élargie et un pilotage vigilant
Pour que la réforme réussisse, Walt appelle à :
- une gouvernance intégrant les CFA dès l’amont des décisions ;
- une méthode lisible et techniquement robuste, fondée sur les codes NSF ;
- une vigilance active sur les effets terrain, notamment pour les formations atypiques ou de petite diffusion ;
- la suppression des distorsions de concurrence entre branches observées aujourd’hui.
Pour conclure : certifier pour libérer, pas pour enfermer
La certification professionnelle doit permettre à chacun de faire valoir ses compétences, d’évoluer, de rebondir, d’explorer de nouvelles voies. Cela suppose des cadres clairs, mais pas rigides, des repères lisibles, mais pas figés.
C’est cette ambition que Walt porte à travers sa contribution à la réforme des bouquets de certification : replacer l’usager — jeune, salarié, entreprise, CFA — au cœur du système, et faire de la certification un levier de mobilité, d’inclusion et de transformation.
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